Forts de leurs objectifs complémentaires et convaincus que la sauvegarde des semences constitue un enjeu essentiel au maintien de la biodiversité cultivée et de la souveraineté alimentaire, Biocoop et le Réseau Semences Paysannes ont décidé de mettre en place un partenariat consistant à développer une meilleure connaissance et compréhension des semences paysannes.
Le Réseau Semences Paysannes (RSP) regroupe plus de 90 organisations nationales et collectifs locaux diversifiés qui font vivre les semences paysannes dans les fermes et les jardins conduits en agriculture paysanne, biologique et biodynamique. Depuis 15 ans, celuic-ci accompagne le développement des initiatives locales de promotion et de valorisation de la biodiversité cultivée, promeut les démarches collectives de gestion et de protection des semences paysannes (les Maisons des Semences Paysannes), participe à la reconnaissance scientifique des savoir-faire paysans associés, et agit pour la reconnaissance des droits des paysans et des artisans semenciers de sélectionner, reproduire, utiliser, protéger, échanger et vendre leurs semences.
3 questions ont été posées à : Patrick de Kochko, coordinateur du Réseau Semences Paysannes et Claude Gruffat, Président de Biocoop.
Pouvez-vous présenter le Réseau Semences Paysannes ?
Patrick de Kochko :
Le réseau est né d’une prise de conscience avec l’arrivée des OGM sur les marchés et dans les champs. En 2001, les tentatives de réglementation pour imposer des semences industrielles certifiées à l’agriculture biologique nous ont fait réagir. AÌ€ l’origine, quatre membres fondateurs ont pris la mesure de ce double péril semencier : la Fédération nationale d’agriculture biologique, l’association Nature et Progrès, le Mouvement pour l’agriculture biodynamique, ainsi que la Confédération paysanne. En 2003, ils ont créé le réseau Semences Paysannes avec un double objectif : essaimer l’envie de retrouver une autonomie de production en facilitant les échanges de savoir-faire et de semences et faire reconnaître juridiquement ces semences paysannes, ainsi que les droits des paysans de les sélectionner et échanger. Aujourd’hui, le réseau réunit plus de 90 organisations membres en France.
En quoi est-ce capital de développer les semences paysannes ?
Patrick de Kochko :
Nos semences paysannes sont issues de la multiplicité de nos fermes et de nos terroirs : t : elles favorisent ainsi le renouvellement de cette biodiversité. Elles offrent une grande diversité génétique naturelle, permettant une plus grande adaptabilité aux différences de sols et de climats. Elles peuvent donc se passer d’engrais chimiques et de pesticides, permettent de redécouvrir le gouÌ‚t des fruits et légumes et d’assurer une qualité alimentaire sans détruire l’environnement. AÌ€ l’inverse, les Semences d’industrie sont des clones, destinées à des cultures intensives et à des conditions standard, d’ouÌ€ le recours aux engrais et pesticides ! Or 90 % des semences utilisées par les bio sont des semences industrielles (lignée pure, hybride F1) car ce sont les seules autorisées dans le commerce.
Biocoop soutient vos actions. De quelle manière ?
Patrick de Kochko :
Par le financement de programmes de sélection visant à soutenir la production de légumes issus de semences paysannes dans plusieurs régions. L’enseigne va aussi nous ouvrir la possibilité aux paysans de distribuer mieux, en circuits courts comme longs… Ce qui se construit avec Biocoop et verra le jour dans l’année, c’est une stratégie permettant de mettre en avant les produits issus de semences paysannes.
Pouvez-vous rappeler l’historique de ce partenariat RSP / Biocoop ?
Claude Gruffat :
Biocoop a contacté le RSP via l’intermédiaire du comité de partenariat afin de participer au travail de sauvegarde des semences reproductibles et la même occasion à la souveraineté des producteurs. Dans un premier temps nous avons participé à la Semaine des semences paysannes organisée par le RSP et à leur Assemblée Générale. Ensuite, nous avons voulu mettre en place un dispositif permettant d’une part de faire évoluer sur le plan technique la sélection des semences reproductibles paysannes et d’autre part d’avoir une offre plus conséquente en magasin. Cette seconde phase est gérée par la DFP (Direction Filières et Produits), notre participation à la Semaine des semences paysannes est restée dans le giron du comité de partenariat. Ce dispositif doit permettre entre autres de dégager du financement destiné à la sélection de variétés adapté aux impératifs agronomiques des producteurs et aux besoins de commercialité du marché mais aussi permettre aux consommateurs une visibilité claire sur l’origine des produits.
Quelle est l’offre présente en magasin ?
Claude Gruffat :
Pour le moment, les tomates de variétés anciennes sont intégralement issues de semences reproductibles puisque c’est une obligation du cahier des charges de Biocoop. Des volumes significatifs plus de 300 Tonnes de chou, chou-fleur, chou-rave, oignon, carotte violette, courge, Rutabaga, Topinambour, Fenouil, Rhubarbe, sont proposés aux magasins par les plateformes d’autres produits qui ne sont pas issus de semences mais de divisions de souche mère, font partie de ce dispositif : artichaut, échalotte, rhubarbe ..Nous manquons de visibilité sur l’offre proposée via la production locale mais celle-ci est significative dans certaines régions ou la proximité avec les membres du RSP est forte.
Quel avenir, quelles ambitions et quels objectifs à court et long terme ?
Claude Gruffat :
Le principal objectif est de donner une visibilité aux consommateurs sur la présence en rayon des produits issus semences paysannes. Pour atteindre l’objectif fixé, nous devons adapter les variétés paysannes par l’augmentation de manière significative de la largeur et la profondeur de l’offre, notamment sur d’autres secteurs tels que les céréales. La mise en place d’outils sur l’offre et les initiatives qui transitent par la production locale nous permettra une meilleure visibilité.